Les enjeux de la Voie Sacrée
En 1915 le commandement allemand décide d'attaquer à Verdun. Il dispose de 14 voies ferrées et de gares importantes, pour acheminer les troupes et le matériel, et soutenir l'effort de la bataille. De décembre 1915 à février 1916, les Allemands vont concentrer un énorme matériel camouflé dans la forêt de Spincourt, les bois de Consenvoye et de Montfaucon. 1225 pièces d'artillerie de tous calibres prépareront l'assaut de sept corps d'armée.
La voie sacrée. Source : Mindef/SGA/DMPA
Origines et organisation
Le choix de Verdun par 1'état-major allemand s'explique par les difficultés de transport prévisibles du côté français. Le commandement français ne peut utiliser qu'un petit chemin de fer à voie étroite reliant Bar-le-Duc à Verdun :"Le Meusien", et une départementale médiocrement empierrée, élargie de 6 à 8 mètres en mars 1915, longue de 67 kilomètres et d'un tracé sinueux et encaissé.
La voie ferrée ne permettait qu'un transport de 800 tonnes par jour. Or il fallait très vite obtenir un débit au moins dix fois supérieur (8000 tonnes).
Voie Sacrée, mémorial du kilomètre zéro se trouvant à Bar_le_Duc. Inauguré le 21 août 1922 par Raymond Poincaré.
Source : GNU Free Documentation License
La veille de l'attaque allemande, le 20 février, le général Herr commandant la région fortifiée de Verdun, organise la réglementation de la circulation sur la route départementale qui deviendra la Voie Sacrée. L'ensemble des transports sur tout le territoire de la région est confié à une commission régulatrice des transports, installée à Bar-le-Duc.
La surveillance et le pilotage le long de la route sont organisés par le service automobile et la route est divisée en cantons de surveillance, sous la direction d'un officier de circulation. On prévoit que tout véhicule civil et toute voiture à cheval seront interdits dès le début d'une attaque. La Voie Sacrée devient prioritaire. On ne passera qu'entre les convois.
Une borne de la voie sacrée. Source : Photo libre de droit
Un enjeu
Ce "cordon ombilical" devient l'enjeu : il faut à tout prix maintenir la circulation. Le soubassement géologique de la route la rend vulnérable à la densité du trafic, au gel et à la pluie. La route est rapidement défoncée. Plus de 10 000 territoriaux vont assurer son entretien 24 heures sur 24. A partir de carrières ouvertes de chaque côté de la route on jette directement la pierraille sous les bandages pleins des camions. Par la suite on devra importer le "cailloux" de Barrière, charge supplémentaire pour les véhicules. 700 000 tonnes de calcaire est incessant. Les chauffeurs conduisent jusqu'à 40 heures d'affilée, et en général 18 heures par jour et pendant 10 jours, sans autre repos que quelques heures de sommeil au fond de leur camion.
La Voie Sacrée - table d'orientation. Photo de JP le Padellec
Monument de la Voie Sacrée. Photo de JP le Padellec
La bataille
La bataille dura 10 mois, jour et nuit. 3500 camions répartis en 42 groupes effectueront le transport de 90 000 hommes et 50 000 tonnes de matériel en moyenne chaque semaine. A ces camions s'ajoutent 800 ambulances, 200 autobus, 500 tracteurs d'artillerie et plus de 2000 voitures de liaison. Le trafic atteindra 300 véhicules à l'heure à la vitesse moyenne de 15 à 20 kilomètres/heure.
Le camion, outil de la victoire
De gauche à droite : Camion Berliet CBA 1913, Latil Type 1915 et Renault EG 1915.
Source : www.fondationberliet.org, trucka.com et www.autocentre.ua
Les chances de résistance à Verdun dépendaient des possibilités d'acheminer sur le front renforts, matériels et munitions. Le parc de véhicules, le bandage des roues, les moteurs, l'éclairage à l'acétylène, la suspension nécessitent un entretien constant.
Toute panne signifiait la mort du véhicule impitoyablement renversé dans le fossé pour permettre la continuité du trafic. Les principaux modèles de camions ont été le Berliet CBA 1913, le Renault EG 1915, le Renault EP 1915, le Renault FU 1916, le transport d!artillerie Latil type 1915, le Latil TP 1916, le Saurer Type B 1916.