Diégo, Charles Brosset
(3 octobre 1898 : Buenos-Aires, Argentine - 20 novembre 1944 : Champagney, Haute-Saône)
Né à Buenos Aires, en Argentine, d'une famille de magistrats lyonnais, Diego Brosset rentre en France à l'âge de deux ans et grandit au château de Rillieux-la-Pape. Ne pouvant supporter l'enfermement des collèges jésuites qu'il fréquente, il arrête ses études à quinze ans pour revenir dans la maison de famille. Lors de la Première Guerre mondiale, il s'engage le 7 septembre 1916 comme soldat de 2e classe au 28e bataillon de chasseurs à pied de Grenoble puis au 68e. En quatre engagements, il obtient autant de citations et est promu caporal, puis sergent.
Combattant distingué, il entre à l'école d'aspirants d'Issoudun et réussit le concours d'entrée à l'école militaire d'infanterie de Saint-Maixent dont il sort en 1921 avec le grade de sous-lieutenant. Il choisit l'infanterie coloniale et est affecté en Afrique occidentale française au 2e régiment de tirailleurs soudanais. Nommé au sein d'un peloton de méharistes en mars 1922, il sillonne le Soudan (Kati), la Mauritanie (Chinguetti, Atar, Agaraktem), le Sud algérien (Touat Gourara, Tindouf) et le Sud marocain (Lekdim) pendant une quinzaine d'années entrecoupées de brefs retours en France, à son grand regret.
Passionné de littérature, il met à profit son temps libre pour achever son roman semi-autobiographique, Il sera beaucoup pardonné, pour l'édition duquel il sollicite le parrainage de François Mauriac. En février 1928, élevé à la dignité de chevalier de la Légion d'Honneur, il est affecté au 23e régiment d'infanterie coloniale à Coulommiers. Au camp de Châlons, il y rencontre Jean Bruller (alias Vercors) et une longue amitié littéraire commence entre les deux hommes. Promu capitaine en 1930, il rentre en France et épouse Jacqueline, la fille du général Mangin, au mois d'août 1931. Il retrouve le Maroc en 1933 pour quatre ans durant lesquels il combat, à la tête du 29e goum, aux cotés du général Giraud. Ecrivain infatigable, il concoure plusieurs fois pour le grand prix de la littérature coloniale, sans succès. Il dépasse ces déceptions en préparant le concours d'entrée à l'Ecole supérieure de Guerre où il est admis en janvier 1937, après avoir obtenu un diplôme de Langues orientales. Breveté de la 59e promotion en août 1939, il est nommé à l'état-major des colonies.
Le 3 septembre, la diplomatie cède le pas aux canons. Brosset rejoint son unité sur le front de Lorraine. En décembre il accepte un poste au 2e bureau du corps d'armée colonial, obtient ses galons de commandant, puis postule pour participer à une mission militaire en Colombie. Sa candidature est retenue et les Brosset arrivent à Bogota au mois de mai 1940. La nouvelle de l'armistice atteint l'Amérique du Sud le 23 juin. En homme d'action, Diégo ne peut s'y résoudre. Il envoie le 27 juin une lettre au général de Gaulle lui exprimant son entière adhésion et se fait un "ambassadeur" de la France Libre dans ses écrits, par le biais de la mission en Colombie qui ne tarde pas à être supprimée. Brosset refuse d'exécuter les ordres du gouvernement de Vichy, qui le condamne à mort par contumace et signifie à sa hiérarchie sa décision de se mettre aux ordres du général de Gaulle.
Le 8 décembre, il peut enfin rallier Londres où il est promu lieutenant-colonel au 2e bureau avant de prendre part au périple colonial du général en qualité d'officier d'état-major : Freetown, Brazzaville, Fort-Lamy, Le Caire, l'Erythrée où il est momentanément le chef d'état-major du général Catroux : la Corne de l'Afrique est alors un enjeu stratégique important depuis l'arrivée de l'Afrika Korps en Tripolitaine. De juin 1941 à décembre 1942, il assiste à la lutte fratricide entre les troupes de la France Libre du général Legentilhomme et celles, restées fidèles à Pétain, du général Dentz dans les territoires de Syrie, situation qui ne sera réglée qu'avec la convention de Saint-Jean d'Acre.
Sa longue expérience du désert lui vaut d'être missionné dans l'Est syrien avant une nouvelle affectation, en janvier 1943, à la 2e brigade à Marsa Matrouh en Cyrénaïque. Brosset réorganise son unité, la conduit à travers le désert libyen vers Gambut (Tobrouk) et la mène à la victoire de Takrouna les 9 et 11 mai en enfonçant les lignes ennemies sur plus de trois kilomètres.
Nommé général de brigade le 1er juin, il reçoit de mains du général de Gaulle la Croix de la Libération puis prend la tête de la 1re division française libre (DFL) au mois d'août, rebaptisée "division motorisée d'infanterie" (DMI). Il réarme et réorganise son corps de troupe avec l'énergie qui le caractérise. Le 11 avril 1944, enfin, la reconquête de l'Europe peut commencer : partis de Bône et de Bizerte, ses hommes débarquent en Italie. Brosset participe à la rupture des lignes Gustav, Dora et Hitler, à la bataille du Garigliano, marche sur Rome et, fin juin, libère la Toscane, avant d'ouvrir un nouveau front dans le sud de la France aux côtés du général de Lattre de Tassigny. Avec sa division, il débarque en Provence le 16 août 1944, reprend Toulon, enlève le mont Redon et Hyères (20-21 août), Le Touar et La Garde (22-23 août) et s'engage dans le pays lyonnais. Toujours dans l'action, le récent général de division marche en tête de la 1re DFL-DMI lors de la bataille des Vosges (20 septembre - 19 novembre 1944).
La ruée vers le Rhin peut commencer. Le lundi 20 novembre l'attaque est lancée sur Giromany. Le général Diégo Brosset, part à l'aube pour le front. Il presse son ordonnance, emprunte des trajets non assurés. Il visite quelques campements, saute de jeep en jeep. Se profile alors le pont du Rahin (Champagney, Haute-Saône). Il s'y engage, la voiture se renverse dans la rivière... Son corps, retrouvé le 23 novembre, sera inhumé dans la nécropole nationale de Rougemont (Doubs). "La France perdait en lui une force rayonnante qui était, ne voulait être et ne fut qu'à son service" (général Koenig).
Source : Mindef/SGA/DMPA
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