L'autre héros de la Marne, Franchet d'Espèrey
Sous l’autorité du général Joffre, le général Louis Franchet d’Espèrey est l’un des « sauveurs de la Marne ». Á la tête de la 5e armée et avec le soutien du corps expéditionnaire britannique, il contrecarre la manœuvre d’encerclement allemande, et oblige ainsi l’ennemi à accélérer son recul.
Intégré à la 5e armée du général Lanrezac, le général Franchet d’Espèrey participe à tous les combats des premières semaines de guerre et à la retraite que les armées françaises entament dès le 25 août. Les mauvaises relations que Lanrezac entretient avec le maréchal French, commandant en chef du corps expéditionnaire britannique, conduisent Joffre à le relever de son commandement le 2 septembre. Franchet d’Espèrey lui succède aussitôt.
Il hérite d’une situation périlleuse et risque d’être pris dans la manœuvre d’enveloppement que tente von Kluck, commandant de la Ire armée allemande. Dans son instruction générale n°4, Joffre a précisé que « Dès que la 5e Armée aura échappé à la menace d’enveloppement prononcée sur sa gauche, l’ensemble des 3e, 4e et 5e Armées reprendra l’offensive… La 5e Armée à l’aile marchante ne doit en aucun cas laisser l’ennemi saisir sa gauche ». Le 3 septembre, alors que la retraite se poursuit en direction de la Marne et de la Seine, le commandant en chef insiste pour qu’une liaison étroite soit établie entre la 5e armée et les Britanniques au sud, les troupes mobiles de Paris et la 6e armée à l’ouest qui dessinent sur son aile gauche le L qui doit briser la Ire armée allemande. Les journées du 3 et du 4 sont cruciales : les Alliés vont-ils être en mesure de profiter de la situation délicate dans laquelle se trouve désormais l’armée von Kluck, qui « défile » littéralement à quelques kilomètres à l’est de Paris ? Lorsque Joffre lui demande s’il estime son armée en état de participer à la contre-offensive, Franchet répond : « La 5e Armée peut combattre, mais n’est pas en situation brillante ». La contre-attaque peut être lancée.
Le 6 septembre au matin, entre Provins et Sézanne, reliée aux Anglais par le corps de cavalerie Conneau, la 5e armée attaque la IIe armée von Bulow, qui réussit à lui échapper et passe la vallée du Grand Morin. Le 9 septembre, alors que Joffre insiste pour qu’une liaison étroite soit conservée avec le corps expéditionnaire britannique, Franchet n’hésite pas à se priver du 10e corps d’armée (CA) pour soutenir Foch sur sa droite. Le même jour, il constitue deux groupements temporaires : les 1er et 3e CA à l’est doivent repousser l’armée von Bulow, tandis que le corps de cavalerie Conneau et le 18e CA à l’ouest progressent avec les Anglais. Sur ces deux axes toutefois, la poursuite est conduite avec trop de retenue et de prudence, permettant aux Allemands de rompre à nouveau le contact. En fait, le commandement français manque de renseignements et Franchet ignore l’ampleur du vide qui existe devant sa gauche. Il ne pousse pas davantage ses divisions d’autant que le terrain rend difficile la progression des troupes, par ailleurs épuisées.
L’attaque coordonnée par Franchet d’Esperey a cependant contraint les Allemands à se retirer de plusieurs kilomètres pour procéder à un réalignement défensif de leur ligne de front. La victoire tactique est acquise, mais une opportunité de la transformer en victoire stratégique échappe aux Alliés. À partir du 11 septembre, la poursuite reprend en direction de l’Aisne, mais l’ennemi s’est déjà dérobé.
Conscient de l’établissement d’un front continu puissamment organisé en défensive par les Allemands, il est le premier à envisager, à l’automne, une puissante action périphérique. Avec son chef d’état-major, le colonel de Lardemelle, il élabore, puis propose au président de la République, dès le mois d’octobre 1914, le projet de débarquement en Grèce d’une armée qui serait engagée aux côtés des Serbes contre les Autrichiens. Approuvé par le gouvernement, le dossier est refusé par le Grand Quartier Général et il faut attendre juin 1918 pour que Franchet d’Espèrey prenne le commandement des armées alliées d’Orient, à la tête desquelles il obtient à la fin du mois de septembre la rupture du front bulgare.
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